Lanzarote… île paradisiaque des Canaries. Connu pour ses vents qui permettent la pratique de nombreux sports aquatiques (surf, windsurf, kit, voile…) ; les villes de l’île semblent s’être pliées aux goûts et couleurs des touristes. Tout y est soigné et magnifique. Les jardins sont superbes, les lumières des boutiques de luxe illuminent les rues, les décorations de Noël profuses…

Pourtant, comme partout dans le monde, cette façade est quelque peu illusoire. Et derrière elle, souvent, se cache une population aux parcours de vie diverses et parfois difficiles.

En visitant les quartiers d’Arrecife, la capital de l’île, guidés par notre ami Juan (marin exceptionnel qu’ont rencontré Seb et Manon aux Baléares), nous sommes tombés dans une rue quelque peu désolée, un à l’écart, et de laquelle on entendait de la musique. On s’approche. Des portes grandes ouvertes nous attirent vers une salle bien éclairée, animée d’un air de fête. On s’arrête. On y entre. Au dessus des portes est inscrit le nom de l’association, “Voluntarios”, une association locale de solidarité (l’équivalent du “secours populaire” ou des “restos du cœur” chez nous).

Quelques membres de l’association

Nous n’avons pas cherché aller à la rencontre de la pauvreté sur l’île, mais ce que nous avons trouvé ici, c’est la richesse de cœur des personnes que l’on a rencontré. La richesse des sourires que nous avons observés sur tous les visages en ce soir de fête. Nous avons tous partagé, par le hasard de nos déambulations nocturnes, un moment magique et conviviale, bouillant d’une chaleur humaine rare. Au delà de ce beau moment, nous en avons profité pour questionner les membres de l’association sur sa raison d’être.

Créée en 1996, l’association s’est vu aux fils des ans devoir accueillir une population toujours plus nombreuse. En grande majorité des hommes; jeunes, voir très jeunes, et jusque des âges avancés. Des profils extrêmement variés. À priori tous ou presque travaillent, ont un logement, mais peine à joindre les deux bouts et ont recours à l’association qui leurs propose des repas chauds, des soins médicaux, une aide à la réinsertion professionnelle et sociale. Surtout sociale. Plus important que les repas et les cafés servis, c’est l’énergie humaine qui règne ici, la plus salvatrice. Nous avons pu observer des scènes de partages qu’il est rare de retrouver en d’autres lieux. Les plus jeunes portent aux plus anciens les repas, les invitent à danser. Chacun une fois son repas fini, lave son assiette, nettoie sa table, range sa chaise et celles de ses voisins.

En cette semaine de Noël, l’association organise des soirées festives. Ici, un couple de danseurs brésiliens nous gratifient de leurs pas élancés; une chanteuse reprend des standards avec une énergie déconcertante et une voix chaleureuse. Nous nous sommes prêtés au jeu, jusque nous joindre à la danse. Dans ces moments d’une grande simplicité, nous avons ressentit à l’unanimité de grandes émotions. Une certaine communion avec les personnes présentes, un réconfort que d’observer une générosité sans condition et une telle bienveillance de la part des bénévoles en particulier. Mais aussi une douleur. Il y avait malgré les sourires et la joie de moment une grande détresse dans le regard de certaines personnes que l’on ne peut effacer de nos esprits. Au delà de ce partage d’émotions et de convivialité, il y avait chez nous un certain mélange de sentiments. Est-ce qu’il n’y aurait pas un certain voyeurisme dans notre démarche, bien que cette rencontre ce soit faite tout à fait au hasard et complètement naturellement? Il est toujours difficile de se confronter à ce genre de situation. Mais  je crois qu’au contraire, nous nous sommes frotter à un univers que l’on cache souvent, qu’il nous est difficile de regarder en face. Et de cette rencontre, nous retiendrons avant tout la générosité, la chaleur, la joie, le partage et toutes ces valeurs qui ont dominé cette soirée.